chaewon & eiji

now i'm lonely at the bar

L'inspiration lui était revenue telle une averse inattendue, aussi imprévisible soit-elle, elle lui avait permit d'écrire, d'enregistrer quelques ébauches et griffonner de potentiel croquis qu'il utiliserait comme modèles pour une collection qui verrait le jour sûrement d'ici quelques mois. Il avait attendu ça de manière impatiente, jusqu'à l'épuisement, et voilà qu'il arrivait à terme de ce trouble, de ce manque cruel d'idées. Quoi qu'il en soit, cette journée ayant été productive, il venait tout juste de terminer l’œuvre sur laquelle il bossait depuis des semaines. Pas de paroles, juste une mélodie, composée au gré de ses humeurs, de ses envies, de ses souvenirs, mélancolique et entraînante à la fois ; un résultat explosif, débordant d'une énergie qui était la sienne. Une composition qui lui sortait de la tête, représentant la confusion de ses maux, du désordre de ses désirs, de la nostalgie du passé. Fatigué par ces dernières heures, il décidait de prendre une pause bien méritée, après laquelle il reprendrait là où il s'était arrêté. Le temps était couvert ; c'était le moment de sortir les pulls et de dire adieu aux tissus fins. La nuit tombée, le vent était froid, les pavés humides et dieu sait à quel point Eiji se bénissait présentement de porter son sweat chaud, tout droit venu de sa propre marque. La capuche rabattue sur ses cheveux désordonnés, il grimpait dans la voiture de son chauffeur, direction ce fameux bar dont on lui avait tant parlé. Ils avait tous sans exception mentionné le goût délicieux pour les artistes en herbe qui passait sur la scène, des artistes inconnu aux yeux du grand public mais de talentueuses personnes, entièrement dévouée à leur passion. Il était clair qu'étant du milieu, de ce monde pour lequel vivaient ces jeunes chanteurs, Eiji se devait d'y pointer son nez, par simple curiosité ou par envie de découvrir un univers sûrement loin du sien.

Un whisky, sans glaçon, avec un zeste de citron ; il était confortablement installé sur une chaise, une table près de la vitre, verre en main. Les yeux rivés sur l'écran de son téléphone, il se baladait sur ses réseaux sociaux, répondant à quelques commentaires de la part de fans hyperactifs. Il écoutait d'une oreille la magie opérée à l'instant où cette fille, sortie de nulle part, ouvrait la bouche. Instinctivement, Eiji verrouillait son portable pour le mettre dans sa poche et relevait les yeux en direction de la scène. Il observait alors avec insistance, la passion dont elle faisait preuve en interprétant un titre d'une beauté et d'une originalité épatante. Le timbre de voix, le rythme enivrant, les paroles ; aucune faille, aucune faute. Peut-être, certaines fois, la maladresse et la faiblesse de ses cordes vocales trahissait son manque d'expérience, mais il était évident qu'elle était dotée d'un potentiel incroyable et qu'il faillait, d'une façon ou d'une autre, la pousser à aller plus loin, à se dépasser. La chanson touchait à sa fin, cependant, toujours épaté par ce qu'il venait d'entendre, il ne parvenait pas à détacher son regard de sa personne. Son regard venait sans qu'il ne s'en rende vraiment compte, percuter le sien. Plusieurs longues secondes défilent sans que rien ne se passe, jusqu'à ce qu'elle daigne venir vers lui en demandant de sa voix poétique, si elle pouvait s'asseoir à sa table ; « Bien sûr », répondait-il, s'accoudant à cette dernière. Les mots lui manquait pour lui dire combien il avait aimé sa prestation, cependant intéressé, il retrouvait rapidement la parole, « J'ai beaucoup aimé ce que tu as fais, tu chantes ici depuis longtemps ? ».

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Après un passage remarquable sur scène, peu importe la superficie de celle-ci, le nombre d'yeux posés sur sa personne, un artiste, quel qu'il soit, se doit de toujours se montrer souriant ; qu'il soit fatigué, en colère, accablé d'un quelconque sentiment similaire. Visiblement Chaewon parvenait à rester souriante et c'était déjà un point positif de plus, pourtant il savait combien ça pouvait être difficile de gérer la pression, le stresse, les regards au début. Cependant l'envie de faire découvrir son monde, son univers aux autres, à la terre entière, surpassait tout, bien plus qu'on ne pouvait se l'imaginer. Très observateur, sûrement par habitude, il ne daignait pas la lâcher du regard, en quête d'une profonde découverte sûr la personnalité coloré que représentait l'artiste nouvelle, assise face à lui. Alors qu'elle signalait vouloir une autre commande, il finissait le fond de son verre qu'il claquait doucement sur le bois de la table, piqué au vif par une curiosité dévorante. Une curiosité qui ne demandait qu'à en savoir plus sur elle, sur sa passion débordante, sur ce talent avec lequel elle jouait harmonieusement. Égaré dans sa contemplation, vagabondant entre quelques réflexions, il se divertissait en faisant tourner les bagues autour de ses doigts. « Ne me remercie pas, t'as une voix merveilleuse », et c'en était presque troublant. Ce timbre particulier qui lui était propre avait de réelles chances de la mener à un succès hors normes ; il était intiment convaincu qu'elle pouvait faire de la musique, un quotidien et de ce quotidien, un rêve dans lequel elle pourrait vivre comme bon lui semble, si c'est ce dont elle avait véritablement envie.

Eiji entrouvrait légèrement les lèvres sous la surprise – son premier concert. Il était évident qu'elle faisait preuve d'un certain professionnalisme dont elle n'avait peut-être pas encore conscience mais qui lui donnait un charme, un charme dont elle seule aurait un jour le secret. « J'ai rarement vu de premier concert aussi réussi », déclarait-il, davantage intéressé par sa personne. Un mince sourire venait s'installer à la commissure de ses lèvres lorsque son interlocutrice venait à se présenter ; d'un simple geste, il faisait tomber la capuche de ses cheveux désordonnés, non pas pour attirer l’œil sur sa personne mais simplement par politesse. De sa paume jumelle, il venait doucement lui serrer la main - « Eiji, enchanté Chaewon », rétorquait l'artiste avant de devoir lâcher sa main à l'arrivée du serveur qui déposait les deux whisky sur la table. Naturellement, il sortait un billet de son portefeuilles qui traînait lui aussi sur cette dernière, payant la commande en adressant un regard à la jeune chanteuse ; « je paie cette tournée, en remerciement au concert de ce soir », il laissait la monnaie au barman et reportait son entière attention sur Chaewon. « On m'avait recommandé cet endroit, je suis content de ne pas être venu pour rien », commençait Eiji, ravi à l'idée que cette petite pause qu'il s'était octroyé, ne soit finalement pas qu'une perte de temps. « Dis-moi, pourquoi tu veux en faire ton métier ? », questionnait-il, à la fois curieux et attentif ; ça pouvait sembler un peu soudain mais c'était la première question qu'on lui avait posé à sa première audition et il lui arrivait de la poser souvent aux potentiels futurs artistes qu'il croisait, mais jusqu'ici, aucune réponse n'avait sincèrement retenue son attention.

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D'un geste similaire au sien, il levait son verre pour le cogner doucement contre celui de Chaewon. Il portait ledit verre à ses lèvres pour apprécier à sa juste valeur, une gorgée de ce délicieux whisky, toujours très attentif aux paroles de la jolie blonde. Eiji se contentait seulement de hocher la tête suite à cette fine révélation concernant le fait qu'elle venait régulièrement dans ce bar, puis, un sourire délicat venait rapidement étirer sa bouche en entendant ses dires. Il était convaincu qu'être venu ce soir était une bonne chose, il avait au moins la chance de pouvoir discuter avec quelqu'un qui éprouvait les mêmes intérêts, le même ressenti à l'égard de la musique. C'était pas spécialement une passion, ni un moyen de gagner la reconnaissance d'autrui ; le monde musical était un véritable défi pour soi-même, un jeu dangereux qui, parfois, offrait des coups bas inattendu. Au delà de ça, c'était un univers spécial dont les plus résistants se laissaient battre par les rumeurs, les médias, les insultes à leur égard, mais qui, malgré tout, trouvait la force de se relever pour mieux régner. On ne pouvait pas le comprendre réellement tant qu'on était pas véritablement reconnu des autres ; c'est lorsque tout commence à s'écrouler, à être instable, qu'on se rend compte d'avoir touché avec brio, cette réussite visée depuis toujours. Il fallait avoir les épaules solides, oser découvrir, apprendre, dévoiler, mais il fallait avant tout n'éprouver la moindre crainte à se redécouvrir des facettes que l'on était loin d'imaginer. Particulier, c,'était un terme encore trop plat pour ce métier dès plus ambitieux, traître et merveilleux à la fois. Cependant, il avait trop souvent entendu de jeunes artistes lui dire « je veux en faire mon job parce que j'aime la musique » ; trop fade, sans conviction, sans étincelles. Ça ne l'intéressait pas, ça n'était pas audacieux et ça manquait cruellement d'originalité. Ce sont ceux-là qui perceront un jour pour tomber aussitôt sans jamais se relever, traîner dans la boue par le regard des autres – il ne voulait pas de ça, il ne voulait pas d'eux, simple histoire de principes, de valeurs et de vision des choses, c'était dur, cruel, mais il était comme ça concernant son métier, il préparait ses protéger à subir, parce que c'est ce dans quoi on s'engage dès lorsqu'on touche à ce domaine. Ceci dit, Chaewon avait visiblement cet élément qui arrivait inévitablement à attiser sa curiosité, à embraser son envie d'en savoir plus, toujours. Il n'attendait pas une réponse autre que celle-là et il était satisfait d'entendre ces mots sortir de sa bouche. « Je ne risque pas de l'oublier de si tôt », commençait-il simplement, goûtant une nouvelle fois ce délicieux nectar alcoolisé, avant de reprendre - « ça s'apprend pas, je veux dire, c'est évident, tu ne peux pas l'exprimer du jour au lendemain, mais crois-moi ça vient avec le temps, avec l'ambition et la détermination à balancer tout ce que tu as sur le coeur, à montrer au monde ce dont tu es capable, qui tu es, il te suffit d'être patiente et de retravailler légèrement tes mélodies pour qu'elle te ressemble vraiment, assez pour que lorsqu'on l'entende peu importe où on se trouve, on se dise, tiens, elle, c'est Chaewon », concluait Eiji en posant son verre sur la table. « On est tous les mêmes au début, on sait pas trop où aller, comment faire, mais sache une chose, c'est ton envie d'y arriver qui te pousseras à essayer jusqu'à parevnir à ton but ».