murphy's law
adage or epigram that is typically stated as:
"anything that can go wrong will go wrong".

tu n'es pas proche de tes parents et, avec le recul, même eux ne semble pas très bien s'entendre. tu n'as jamais su leur histoire, comment ils en sont venu à être ensemble et, de toute façon, ça ne t'intéresse pas. ça ne respire pas l'amour et l'envie de fonder une famille, tu ne vois que les affaires derrière ce mariage. tu ne cherches pas à comprendre, tu ne poses pas de questions. pas même à sept ans quand on te dit de faire tes valises pour aller vivre dans un autre pays. ton esprit d'enfant ne voit que les avantages de découvrir un nouvel univers, de lier de nouvelles amitiés. tu vois les couleurs sur un tableau gris. moins tu passes de temps à la maison, mieux tu te portes puisque ça te ronge de te faire ignorer. un fantôme rarement remarqué, tu fais un peu ce que bon te semble. ils s'en fichent que tu rentres tard au beau milieu de la semaine alors que tu n'as que quinze ans. ils s'en fichent que tu dérobes l'alcool qu'ils avaient pourtant cachés dans le haut des armoires.

tu collectionnes les conneries avec tes amis. malgré les années, les images restent gravées dans ta mémoire, son visage présent comme un film au ralentit où tu l'entends encore s'esclaffer sur tes idioties imbibées d'alcool. jeunesse qui se croit invincible, concept trop familier dans des événements qui se déroulent dans un éclair. une seconde elle rit encore aux éclats à tes côtés et celle suivante le silence règne lourdement. tu n'as jamais su à quel moment elle a décidé de traverser la rue au mauvais instant. vous qui rentriez à pied plutôt que de prendre le volant avec un ami ayant trop bu, l'ironie a frappé. chauffeur en état d'ivresse, réflexes manquants, un inconnu irresponsable a fauché ta meilleure amie. l'âme inconsolable aux funérailles, c'est toi. de toutes les fois où elle t'avait promis d'emporter tes secrets avec elle dans sa tombe, tu ne croyais pas que ce serait si tôt. 

tu traînes les pieds pendant des mois. le sourire te fait défaut, constamment au bord de craquer malgré le soutient de tes autres amis. tu le considères de la rejoindre, de consoler ce vide au creux de ta poitrine que tu ne parviens pas à remplir, mais tu sais que ce serait le geste ultime à commettre pour la décevoir. ce ne sont pas tes parents qui te viennent en aide, ils n'ont fait que t'offrir un sourire triste en apprenant le décès de la personne la plus importante dans ta vie après tout. c'est l'un de tes amis qui te force la main, qui passe un coup de fil pour te prendre rendez-vous avec un psychologue et qui se charge de t'y emmener. honnêtement, tu n'as pas la force de t'y opposer et, au final, tu es reconnaissant qu'il ait pris cette décision. c'est une montagne que tu apprends à traverser avec le temps, assez pour de nouveau retrouver le goût du bonheur.

il est de courte durée cet instant heureux. tu ne sais quelle folie te pousse à être honnête avec tes parents, à avouer ton attirance autant pour les femmes que les hommes et c'est visiblement la raison qu'ils attendaient pour te foutre dehors. ils n'expliquent même pas, aucun argument qui accompagne leur geste. en moins d'une heure, tu te retrouves la porte au nez avec une valise et ton sac à dos. t'as dix-neuf ans, tu peux supposément te débrouiller tout seul, mais tu termines sur le canapé d'un ami pendant un mois en attendant de mettre de l'ordre dans ta vie. tu cumules cernes sous les yeux, les heures de cours pour devenir infirmier et les boulots minables pour payer ton loyer miteux. tu cohabites avec un mec louche et trois cafards pendant trop longtemps, y'a souvent une forte odeur de marijuana dans l'air et le chauffage fonctionne à moitié. tu es certain que c'est le fond du baril et que ça ne peut qu'aller mieux après ça. tu souffres dans ce rôle trop maternel avec ce gars que tu connais à peine le temps de tes études, le temps de trouver un emploi et pouvoir foutre le camp.

bien sûr, quand tu décroches l'emploi de rêve dans une clinique et que tu en viens aux faits avec ton colocataire, ça n'a rien de rose. tu n'es pas certain de la langue dans laquelle il te gueule après, mais il y a du mépris, une colère inexpliquée et pendant un instant tu crains que ça flanche sur un plan physique. point positif, ça n'arrive pas. point négatif, tu te fais encore une fois pratiquement chassé de chez toi, récupérant tes affaires en vitesse en te faisant qualifier de tous les noms. avec ça, tu quittes sans aucun regret pour ton propre chez toi. c'est petit, pas tout à fait glorieux, mais le loyer est raisonnable. un prix qui vient avec des souris, mais tu règles le problème en adoptant un chat. c'est une vieille boule de poils grincheuse et un peu sourde. tu finis par l'amadouer à coup de morceaux de poisson frais et vous déménagez enfin dans un endroit plus convenable. le chauffage fonctionne sans problème, il n'y a pas de bestioles entre les murs, les voisins sont sympathiques et courtois.

il t'a fallu plus de vingt ans pour trouver ton petit coin de paradis, mais t'es heureux et c'est le plus important.