Elle tremblait sous le petit pont, ses phalanges glacées frictionnant ses bras pour tenter d'oublier la température. Après deux jours sans manger, en ne buvant que de l'eau grâce aux toilettes publiques, elle commençait à croire qu'elle ne survivrait plus longtemps. Et son bébé non plus. Elle avait encore vomit, ses jambes ne la portaient qu'à peine, et ce mois de mars particulièrement frais ne l'aidait pas à subsister. Elle se disait que c'était la fin. La pire des fins possibles : sa famille l'avait mise à la porte, elle avait dû se prostituer, un riche homme s'était offert ses services et l'avait mise enceinte en lui promettant de la sortir de là, et était finalement partis dès qu'elle avait annoncé attendre un enfant.
Elle avait été naïve, et les autres l'avaient abandonnées. On ne laissait pas une femme enceinte se prostituer quand même... Mais elle n'avait nul part où aller, et plus d'argent. Il n'y avait pas grand monde à passer, et on ne la regardait même pas. Elle pleurait alors sur son sort d'adolescente mourante, priant pour qu'un miracle survienne.
Le salut c'était une couverture sur ses épaules, une soupe, et cette vieille dame avec un léger accent français qui lui demandait "Bah alors ma petite fille, que fais tu là toute seule ?". Elle avait hoqueté, déballé son histoire, et trouvé refuge auprès de cette sauveuse dont elle ne savait rien. Elle était sa fille maintenant. Elle avait un toit, et elle n'était plus seule.
☾In the name of the moon☾
Des jumeaux arrachés l'un à l'autre dès les premiers mois. Elle n'y croyait pas, elle en hurlait son désespoir, la rage la consumait, la douleur aussi. Il avait détruit sa vie une seconde fois, et il venait réitérer la chose en lui enlevant un de ses enfants. Pourtant il n'en voulait pas, non ?! Pourquoi diable était il revenu ?!
Elle n'avait aucun moyen de le traîner en justice. Il ne lui restait qu'un seul de ses enfants, sa petite lune, privé de son soleil, dont elle murmurait le nom pour se consoler, comme un mantra, se promettant de protéger ce petit être qui était pour elle ce qu'elle avait de plus cher en ce monde.
"Il portera le nom de sa maman, de la personne qui l'aimera indépendamment de ce qu'il deviendra, avait commencé la vieille dame qui la logeait, le prénom que sa grand-mère lui aura donné, et tu verras, toutes les deux, on lui offrira tout ce dont il aura besoin."
Lunaire était un enfant choyé. Élevé dans la certitude d'être fils unique, avec sa grand-mère et sa maman, jamais il n'a semblé manquer de la présence d'un paternel. Il apprenait le français avec sa grand-mère, pensait innocemment que sa maman partait le soir travailler dans un bar, servir des boissons multicolores. Le soir, sa mamie le bordait sur le canapé, elle remontait le plaid sur sa figure, et lui disait "Tu grandiras plus vite avec du chocolat" en lui tendant parfois un carré.
En rentrant de l'école, il allait regarder sa grand-mère cuisiner, prenant le tabouret pour enregistrer chaque geste avec intérêt. Il voulait aussi faire de la cuisine, pour mamie et maman. "Ça, ça sera un bon garçon !" s’esclaffait alors la vieille dame, faisant chanter les petites pierres à ses boucles d'oreilles.
Elle lui montrait la lune parfois, sa maman, le matin très tôt, et lui disait tout doucement "La lune ne brille pas autant que le soleil, mais même les nuits les plus sombres elle reste toujours brillante. Tu vois, ton prénom, ça veut dire que même quand les autres seront tout au bout du plus sombre des tunnels, tu sauras être là pour eux. Tu seras quelqu'un de bien Lunaire. Les personnes biens sont celles qui te tendent la main sans rien attendre en retour, et ne partent pas quand tu es au plus mal."
☾ Cher Lunaire, te souviens-tu de moi ? ☾
On était dans la même classe jusqu'à l'école primaire. J'étais un enfant bruyant, et tous les parents avaient fait en sorte que leurs enfants ne viennent pas vers moi. Pourtant tu t'asseyais sur le même banc que moi. Tu humais un air musicale, quelque chose que tu prétendais être un tube français du moment, Je te trouvais impressionnant parce que tu parlais français et coréen, mais en vrai, j'ai appris que tu n'étais pas un élève extraordinaire au fond. C'est pour ça que je suis devenu ton ami.
Je t'ai offert un morceau de madeleine, parce que tu n'avais jamais de goûter sur toi. Je crois qu'on est vraiment devenus amis à ce moment là. Et puis tu m'as dit que ta mamie voulait pas que j'aille chez toi. Je l'ai trouvée très méchante. Tu n'as jamais ramené un ami chez toi, et tu n'allais jamais chez les autres.
Tu sais, vous n'aviez pas à le cacher. En espionnant des mamans lors des portes-ouvertes, j'ai appris que ta maman se prostituait. Je ne sais pas très bien ce que ça veut dire, mais ça avait l'air d'être mal. Même si on allait pas chez toi, on le savait.
Tu étais un garçon qu'on évitait. Je me suis obstiné à essayer de rester avec toi, je t'ai prêté ma guitare, et tu grattais les cordes des étoiles pleins les yeux. Tu me semblais être un enfant normal, en dehors de tes habits sales et trop petits, de ton physique maigrelet et du fait que tu n'avais pas de papa.
Ta mamie a été hospitalisée quand tu avais huit ans. J'ai entendu dire que tu étais celui qui avait appelé les secours. Tu sais, moi je ne sais toujours pas leur numéro, aux secours... Et les deux années qui ont suivit, elle est restée à l'hôpital, à remonter et rechuter sans arrêts. Tu repartais seul de l'école, en souriant comme toujours. Tu parlais de préparer à manger pour ta maman. Et moi je me demandais quel enfant de neuf ans faisait ça pour ses parents...
Ta mamie est revenue à la maison, tu avais dix ans, et tu as été celui à t'en occuper comme elle l'avait fait quand tu étais petit. Mais tu étais toujours petit, le savais tu ? Tu portais l'idée de savoir que tu t'occupais d'une mourante, préparant ses repas, son lit, faisant les courses et l'aidant à se déplacer, et ta maman s'absentait parfois la journée pour demander de l'argent, car vous n'aviez plus assez pour subvenir aux traitements médicaux de ta grand-mère.
Elle t'en a parlé, un soir, ta mamie, du travail de ta maman. Et ta maman te l'a ensuite réexpliqué, tout doucement, "Ma petite lune, mon travail, c'est de faire plaisir au corps des gens. C'est très mal vu ici, mais tu sais, c'est aussi grâce à ça que tu es là, et quand bien même cette époque est désespérée, je referais ce même chemin à coup sûr si c'est pour t'avoir comme fils."
Tu n'as jamais eu honte de dire que ta maman se prostituait. Tu étais fier d'elle. Et je ne pouvais pas le comprendre. Tu n'avais pas peur de le dire, ignorant surement ce que cela impliquait, et on te regardait avec pitié et mépris.
Tu étais indésirable Lunaire. Même ta maman ne te voulait pas. Tu es né par erreur, et tu resteras une erreur.
Je voulais que tu le saches avant de déménager. Et que tu saches le mal que tu m'as fait. Je n'oublierai pas, leurs regards dégoûtés ou moqueurs, et les mauvaises farces. Si tu n'avais pas été là, tout aurait été plus simple.
☾ Ma petite lune, puisque je vais bientôt monter au ciel... ☾
Tu étais le petit-fils que j'ai toujours voulu avoir. Tu ne pourras jamais savoir tant je suis fière de toi. Même quand je te reproche d'avoir parfois de mauvais résultats à l'école, d'un peu trop flemmarder, ou de rêvasser tout le tout. Tu souris mon petit, même quand je vais pas bien, et tu m'accompagnes mieux que je ne t'ai élevé. Tu n'as pas oublié ce qu'on t'a appris, tu as dépassé nos espérances.
Mon petit Lunaire, nous ne sommes pas riches, nous ne sommes pas aimés, et peut-être que tu es un élève médiocre, rêveur, et impopulaire. Mais nous sommes ensembles, et même quand je monterai au ciel, je serai là pour t'aimer. Quand j'ai récupéré ta maman dans la rue, je n'espérais jamais être remboursé d'une si belle façon.
Je vous dois plus que vous me devez, même si tu penses le contraire. Travaille bien avec ton violon. Comme dernier cadeau je pense aussi t'offrir un peu de matériel pour faire de la musique, et pas seulement du violon : je vois bien qu'il te fait souvent grimacer. Tu as toujours aimé la musique. Si c'est ce que tu aimes, si un jour tu veux continuer sur cette voie, je te soutiendrai. Je serai toujours là pour toi Lunaire, comme tu l'es pour moi en ce moment.
Je ne pourrai pas te voir devenir adulte, hélas. Tiendrai-je seulement jusqu'à ton treizième anniversaire ? Tu grandis si vite, dans six ans tu seras déjà un adulte ! Et ce n'est pas grave si tu fais ta poussée de croissance tard. Tu as tout ton temps pour ça.
Je rêve de toi, parfois, et dans mes songes tu es devenu quelqu'un de bien. N'oublie jamais que les plus beaux cadeaux arrivent quand tu ne les attends pas. Offre sans compter, aide les autres, et tu comprendras pourquoi je ne regrette rien.
☾ Mon petit Lunaire, je suis à la maison avec toi tous les jours, alors c'est drôle de t'écrire comme ça... ☾
Je sais que ça a été dur. Tu sais bien que mamie n'est pas ma maman, et que pour toucher l'héritage, il a fallut se battre. Si on perdait, on perdait la maison, notre seul toit... Tu savais ce que l'argent représentait dans notre société. Tu ne t'es jamais plaint de manger plusieurs fois la même chose, de rater le petit déjeuner ou le dîner. Si mamie était encore là, elle aurait été fière de toi. Elle est partie quelques jours avant ton treizième anniversaire. Tu as été stupide de lui promettre de ne pas pleurer. Tu avais les yeux qui brillaient, tu tremblais, et ton sourire était vraiment laid à l'enterrement. Je sais que tu fais de ton mieux à chaque fois Lulu', mais il faut être honnête de temps en temps. Tu ne pouvais pas ne pas pleurer. Je t'ai entendu pleurer aux toilettes. Tu n'as pas à avoir honte, c'est normal d'être triste aussi.
Tu as ouvert ta chaîne Youtube à seulement treize ans. Je n'étais pas vraiment d'accord au début, mais tu disais que tu voulais faire de la musique, et montrer ça à tout le monde. C'est comme ça que Brume est né. Je n'ai jamais osé écouter ce que tu faisais, je dois bien avouer... Mais quelques années plus tard, il m'arrivait d'entendre tes chansons dans les supermarchés... Te souviens-tu d'où tu es partit ?
Quand je pleurais, tu étais celui qui me consolait. Tu ne voulais pas pleurer devant moi. Tu as toujours détesté inquiéter les autres, mais tu sais, tu es vraiment nul pour cacher ta tristesse.
J'avais peur qu'à l'école ça se passe mal. Tu parlais de camarades, à chaque fois différent, de leurs problèmes, de comment tu les consolais, mais tu n'as jamais vraiment eu d'amis. Tu disais que ça se passait bien, que tu traînais avec des gens populaires, et j'y croyais aveuglément, parce que c'était tout ce que tu me montrais.
Je déteste te voir mentir Lunaire, même si c'est pour ne pas me rendre triste.
J'ai appris très tôt, en lisant un journal que tu tenais à l'époque, que tu aimais aussi les garçons. J'ai toujours peur pour toi à cause de ça ma petite lune... Je t'ai déjà raconté que ma famille m'avait chassé pour ça, et je ne veux pas qu'on te fasse du mal parce que tu ne te contentes pas d'aimer les filles. Et tu avais, et as sûrement peur encore... Parce que tu vois les images de violence à votre égard, tu entends les propos haineux, et tu penses que tu es quelqu'un de mauvais. Je sais que tu détestes cette part de toi, je l'ai lu. Lulu', si tu aimes les filles, les garçons ou autre, cela ne fait pas de toi une mauvaise personne. Une bonne personne, c'est une personne qui aide les autres sans rien attendre en retour.
Je sais que ta quinzième année a été très dur. Quand j'ai perdu mon travail, tu as joué des pieds et des mains pour faire fonctionner ta chaîne Youtube et amasser des sous avec des partenariats publicitaires. Et tu as été fou de rage en apprenant que ton propre père était le responsable de cette situation. Il détruisait ma vie, une quatrième fois. Comment retrouver un travail sans études, et en ayant jusque là fait des activités illégales ? Je n'en dormais plus la nuit, je ne voulais pas qu'on t'arrache à moi.
Tu as aimé ce garçon dans ta classe cette année là. Il s'est joué de toi, tu l'as amené à la maison, il a appris pour mon travail. Je sais qu'il est responsable de la suite. Des bleus, des coupures, de tes genoux sanglants, tes vêtements trempés, de tes cahiers couverts d'insultes et de menaces. Tu crois que je ne l'avait pas remarqué, cette nuit où tu n'es pas revenu, après t'être évanoui blessé à la sortie de l'école ? Tu crois que je ne voyais pas les blessures que tu cachais, que je ne t'entendais pas pleurer caché dans la salle de bain, que je n'ai pas vu tes avants-bras se couvrir des marques de ta souffrance, ta colère, et ta haine à ton égard. Tu n'as jamais su détester les autres Lunaire. Tu préférais t'en prendre à toi. Tu leurs en voulais, mais tu ne pouvais pas les haïr.
Mon petit Lunaire, quand tu as demandé à changer d'école, à changer de ville en prétextant vouloir rejoindre un ami d'enfance, c'était parce que le matin même, des parents avaient bloqué ton établissement pour te faire renvoyer. Parce que tu aimais un garçon, et qu'ils ne voulaient pas de ça dans leur école. Je le sais, j'ai été appelé. Je ne sais pas tout ce qui s'est passé, mais tu n'aurais pas dû rester seul avec ça.
Je me suis endettée, nous avons changé de ville, tu as pleuré parce que tu savais qu'on avait pas les moyens de partir. Tu étais désolé, tu t'en voulais toujours plus. J'étais aussi perdu que toi, parce que je les avais vu te détruire sans savoir quoi faire, sans avoir l'argent pour saisir la justice. Lunaire, arrête de t'excuser, c'est eux qui devraient être désolés et avoir honte de ce qu'ils t'ont infligé.
J'ai reçu des menaces de ton père, qui voulait te récupérer. Tu te sentais toujours plus responsable de ce qui m'arrivait, je le savais. Mais je ne te laisserai pas retourner vers lui, je ne te laisserai pas disparaître comme mon petit soleil... Lunaire, reste loin de lui. Reste loin de cette vérité qu'il veut te faire miroiter, de ce qu'il tient en otage.
☾ Salut Lunaire, c'est Saejin, est-ce que tu te souviens de quand on s'est rencontrés... ☾
Tu n'étais pas un élève exceptionnel, mais tu ne bossais pas si mal. Tu es arrivé en cours d'année à Cheonan High School. Tu avais un petit air racaille avec tous tes pansements aux premiers abords, on faisait circuler de sales rumeurs comme quoi tu aurais été viré de ton ancien établissement pour des histoires de gang. Moi j'y croyais pas, tu étais trop gringalet, tu te serais fait défoncer en deux-deux dans un gang ! Et si tu avais été ce type de personne, j'ignorais comment tu aurais pu finir à Cheonan.
Tu étais un garçon silencieux et rêveur, planqué au fond de la classe, peu bavard, mais tu souriais à tout le monde. Tu ramassais les stylos et les gommes, tu faisais les corvées de ménage à la place des autres, tu faisais aussi parfois leurs devoirs... Tu m'avais toujours énervée. Tu semblait apprécier d'être un larbin, et tu riais toujours comme un petit ange innocent. Je suis tombée amoureuse de ton sourire, on s'est embrassés après la chorale après une sacré engueulade de ma part, pour te dire à quel point tu étais naïf.
J'avais confiance en notre lien. Tu me consolais quand je ratais mes compétitions de gymnastiques, ou quand je me blessais, et j'ai appris à connaître autre chose que le petit rêveur calme et souriant qui essuyait les larmes de tout le monde. Tu étais curieusement faible... Tu ne voulais jamais pleurer devant les gens, mais tu te dévalorisais tout le temps, tu baissais les bras, tu te disais que tout ce que tu faisais ne rimait à rien, que tu étais un incapable... J'ai appris à aimer ces choses en toi aussi. J'ai tout aimé de toi.
Quand ce garçon de ton ancienne école est arrivé, tu m'as raconté que tu l'avais aimé. Il m'a dit que tu avais détruit sa vie. Il t'a traîné un soir à la sortie du lycée, après plusieurs menaces, des semaines et des semaines entières de culpabilisation, de torture psychologique... Et on t'a frappé à mort. Tu aurais pu y passer. Quand j'ai accourut vers toi, tu ne respirais qu'à peine, on t'avait brisé quelques côtes, mais tu refusais encore de pleurer parce que tu ne voulais pas que je sois triste.
Lunaire, je suis ta petite-amie, je t'aime même quand tu me rends triste. Et ce qui me rendait la plus triste, c'était de savoir que tu souffrais.
A l'hôpital, je t'ai apporté une peluche, Mr. Heartache, parce que tu étais passé à deux doigts de te faire perforer le cœur (trash cette histoire quand même...). J'ai étayé l'affaire auprès de ta maman, j'ai parlé d'une grosse chute, nous avons masqué la chose. En revenant, il a fallut le temps de prouver la culpabilité de tes agresseurs, et ils en ont profité pour se venger... Comme ils pouvaient. Tu te souviens de la fois où je les ai attaqué avec un marteau ? Tu m'as reproché d'avoir été poussée vers des intentions meurtrières, mais ils ne se sont plus approchés de toi en ma présence.
Tes agresseurs ont été renvoyés. Tu as pleuré parce que c'était ta faute. Lunaire... Tu es vraiment un idiot. Tu aurais plutôt dû penser à ta maman qui venait de trouver un travail de caissière ! Elle était très fière, mais tu avais préféré ruminer sur le triste destin de personnes qui auraient pu te tuer. Vraiment, si je ne t'aimais pas, je t'aurais filé une baffe.
☾ Saejin, ☾
Je n'ai pas pu te sauver. Tu avais bandé mes avant-bras ce soir là, sans rien me dire. Tu m'avais redonné une boîte d'anti-dépresseurs, et on avait parlé de séries, comme toutes les soirées qu'on faisait chez toi. Tu avais pleuré devant le feuilleton, et je pouvais te tenir là, dans mes bras. Tu avais proposé une sortie au parc en face. On est arrivé sur le trottoir, j'ai passé le passage piéton en premier, et tu bougonnais derrière.
Tu sais, ce passage piéton, il était juste à l'intersection de routes étroites. Tes parents disaient toujours qu'un jour quelqu'un se ferait écraser là...
Tu étais étendue sur le sol, Saejin, tu te vidais de ton sang, et le conducteur ne s'était pas arrêté pour voir si tu étais vivante. Tu me traitais d'idiot avec le sourire, tu m'avais demandé de parler. De parler de ma musique, de ma chaîne. Tu t'étais esclaffée en disant que j'étais une célébrité, que c'était bête de ne pas avoir fêté avec de l'alcool mon million l'année dernière. On avait essayé de te monter sur un brancard, et tu m'avais traité d'idiot pour la énième fois
Où es tu parti ? Où es tu en ce moment ?
J'avais peur de ne plus pouvoir te voir. Tu sais, pour une fois, j'ai fait comme tu avais dit... J'ai pleuré à ton enterrement. Je devais rester derrière, je n'avais même pas été invité. Tes parents pensent que j'aurais dû te protéger, que j'aurais dû y passer à ta place. Ont ils raison ?
On aurait dû faire notre rentrée pour notre année se Senior ensembles, mais tu n'étais plus là. Mon père est venu pour la première fois le soir de la rentrée. Tu aurais halluciné devant tant d'indécence. Il est arrivé avec une voiture de luxe, il est descendu lui-même pour me dire qu'il allait me récupérer, qu'il allait reconnaître que j'étais son fils, et de faire de moi son héritier. Je crois que j'ai juste explosé une de ses vitres. Il n'était pas content, mais tu sais, je ne regrette même pas ce que j'ai fait.
Saejin, c'est difficile Cheonan sans toi. Sans ton aide, c'est vrai que je ne suis rien. Tout recommence. Je crois que je ne m'en sortirai jamais. Parfois je réécoute ton dossier de chansons préférées, et toutes les fois où tu m'as suggéré de dire que je tirais mes bleus de petits accidents durant les fêtes. Tu disais qu'au fond, c'était beau, ça faisait pleins de couleurs... On s'en moquait, de si les autres nous détestaient à l'école, on était ensembles...
Je sais que tu n'aimes pas ça, mais je ne veux pas devenir un mauvais garçon. Je ne tirerai rien d'être méchant avec les autres. Maman veut que je reste ce que je suis, que je continue à aimer et à aider sans rien attendre en retour. Tu sais, c'est difficile de ne la voir que le week-end, mais de ne plus te voir, c'est vraiment le pire. Je t'ai vu hier ? Enfin, je ne sais plus bien. Je te vois partout, mais tu n'es jamais là.
J'ai peur de te le dire. J'ai peur de te dire que je ne te vois plus. Est-ce que mon esprit a fait une croix sur ton esprit, ou es tu vraiment partie trop loin pour que je puisse espérer te revoir ? J'ai crû te voir, quand Cheonan a brûlé aussi. Tu souriais. Est-ce que ton sort t'étais si peu important ?
S'il te plaît, si tu es encore en vie, envoie moi un signe. Je ne sais plus quoi penser. Ne me déteste pas. Ne me déteste pas...